Prochaines élections : la DMK divisée
La Dynamique Mgr Kpodzro participera-t-elle aux prochaines échéances électorales au Togo ? Difficile de répondre avec exactitude à cette interrogation puisque la dernière sortie de ce regroupement de partis de l'opposition n'a pas permis de lever l'équivoque. Et pour ne rien arranger, la réaction du prélat au lendemain de cette sortie, vient jeter un pavé dans la marre et entretient davantage le flou concernant la position actuelle de ce bloc face aux prochaines compétitions électorales.
Les membres de la Dynamique Mgr Kpodzro étaient face à la presse vendredi dernier pour disent-ils situer l'opinion nationale et internationale sur l'éventualité de leur participation aux prochaines élections régionales et législatives. Mais au bout d'une heure d'échanges avec les professionnels des médias, les premiers responsables de ce regroupement n'ont pas réussi à clarifier leur position sur le sujet malgré le fait que la question leur a été posée plusieurs fois. En ce qui concerne par exemple les élections régionales, les membres de la DMK sans être clairs sur l'idée d'y participer, estiment que la tenue de ces élections n'est pas opportune et que la mise en place du Sénat ne sera que du gaspillage de ressources.
« Au sujet des élections régionales que prévoit d'organiser le gouvernement de Monsieur Faure Gnassingbé, la DMK n'y trouve aucune opportunité, aucune urgence dès lors que la feuille de route issue du séminaire national sur la décentralisation, organisé en 2016,….n'est pas respectée et que les communes ont de la peine à assumer leurs missions, en raison des multiples entraves administratives, du déficit de moyens financiers et d'équipements…La démarche du régime visant à faire émerger un Sénat relève de la diversion, de la manipulation politique, du clientélisme….. » indiquent-ils dans la déclaration liminaire avant d'ajouter : « Le pays traverse une grave crise et le bon sens voudrait que les allocations budgétaires que nécessitera cette institution budgétivore aux résultats incertains, soient allouées à d'autres secteurs essentiels et directement liés à la vie des populations ».
Pour le cas des élections législatives, la DMK dit exiger qu'un certain nombre de mesures d'apaisement soient prises pour que ces élections soient inclusives et transparentes notamment le retour au pays du prélat Mgr Kpodzro et de son leader Agbéyomé Kodjo, la libération de tous les prisonniers politiques, la sécurisation de tout le territoire national, les réformes relatives à la composition et au fonctionnement de la CENI et ses démembrements etc...
« Quant aux élections législatives qui sont aussi annoncées avant la fin de cette année et qui répondent à un agenda républicain, la DMK exige qu'un accord soit trouvé pour une issue du contentieux électoral qui perdure depuis 2020 à ce jour. Cet accord doit déboucher sur la refonte de la gouvernance électorale et la mise en place d'une charte démocratique qui garantit l'éthique, la transparence électorale et la sécurité des candidats avant, pendant et après les scrutins » note -t-on dans leur déclaration liminaire.
Si Mme Brigitte Adjamagbo-Johnson et les siens restent encore dubitatifs sur la question de la participation ou non aux élections régionales et législatives prévues pour cette année, Mgr Kpodzro quant à lui rejette catégoriquement toute idée liée à une quelconque participation à ces deux rendez-vous électoraux.
En effet, réagissant au lendemain de la sortie de son regroupement, le prélat fustige la position (certes floue) de sa troupe. « Pour moi, il ne doit pas y avoir de confusion sur la question. Pour ce qui me concerne, il n'est pas question que la Dynamique qui porte mon nom participe à un simulacre d'élection de trop tant que le contentieux électoral du 22 février 2020, ayant porté Dr Messan Agbéyomé Kodjo à la présidence de la République, n'est pas réglé. Sinon, quel sens aurait ma présence en exil ainsi que le président démocratiquement élu ?», s'interroge-t-il avant de mettre en garde. «Quiconque tentera sous quelques prétextes que ce soit de participer à ces élections contre la volonté du peuple me trouvera sur son chemin. Je dis gare à ceux qui s'amusent avec la destinée du peuple togolais pour leur ventre. Car je n'ai pas l'intention de me taire. Je me battrai».
A l'analyse, cette déclaration tapageuse de l'archevêque émérite de Lomé n'arrange pas les petits calculs des responsables politiques de la DMK. Au contraire, elle soumet l'ensemble des leaders de ce regroupement à un véritable dilemme : participer ou ne pas participer aux échéances électorales prévues pour cette année ? Le choix est d'autant plus difficile à faire puisque d'un côté, l'on a certainement envie de prendre part à ces élections puisqu'ayant tiré leçons du passé et que manifestement, que l'on a finalement compris la nécessité de participer aux législatives pour tenter de disposer éventuellement d'une minorité de blocage à la prochaine législature ou à défaut, avoir un droit de regard au parlement histoire d'être au parfum des lois qui y seront votées. De l'autre, l'on sait qu'il n'est pas évident de voler de ses propres ailes sans la caution morale du prélat. Que faire alors dans ce cas ?
Tous les observateurs savent à quel point le nom de Mgr Kpodzro avait fait basculer l'électorat de l'opposition au scrutin présidentiel de 2020 en faveur du candidat de la DMK qui est arrivé en deuxième position, devançant ainsi de façon irrationnelle le candidat de la plus grande formation politique de l'opposition, Jean Pierre Fabre (principal challenger de Faure Gnassingbé aux scrutins de 2010 et 2015).
Au regard des conséquences fâcheuses du boycott des législatives passées, il serait suicidaire pour l'opposition dans son ensemble de commettre les mêmes erreurs en se mettant encore à l'écart par rapport aux prochaines élections. La CENI étant déjà à pied d'œuvre pour les préparatifs liés au recensement, les membres de la Dynamique savent ce qui leur reste désormais à faire pour ne pas se mordre encore les doigts après. Cependant, il faudra absolument trouver une réponse à une problématique, et pas des moindres : sur quel électorat va-t-on maintenant compter sans le prélat pour aller à ces scrutins ?
L'on sait que tous les partis membres de la DMK souffrent de légitimité populaire parce que n'ayant pas véritablement de base électorale.
Aujourd'hui qu'il est question de se départir de la caution morale du prélat pour prendre son autonomie, la question de ce que pèse politiquement chaque formation de ce regroupement sera à l'ordre du jour et va inéluctablement alimenter les débats au sein de l'opinion. Une question qui doit certainement donner de l'insomnie en ce moment aux leaders de ce regroupement politique.
Roger GBESSIA
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